D’une poignée de garages à un groupe de 1.350 collaborateurs suite à ses acquisitons en France et à Liège, Louyet, c’est l’histoire d’une ambition et d’une vision hors norme dans le paysage automobile belge.
Il a fixé le rendez-vous lui-même, sans intermédiaire. Laurent Louyet n’est pourtant pas un patron qui s’ennuie. Coup sur coup, il vient de faire deux grosses acquisitions, le groupe Discar, en province de Liège, et les concessions BMW de Cannes et Nice, soit environ 400 collaborateurs en plus dans la société familiale.
Alors qu’il nous reçoit dans sa concession Rolls Royce de Waterloo, Le CEO du groupe Louyet rayonne. Il a rencontré ses nouvelles équipes à Liège et en France, de quoi créer du lien humain, ce qu’il affectionne particulièrement, même s’il avoue ne plus être capable de connaître le prénom de tout le monde dans son entreprise.
Depuis qu’il a repris les affaires familiales en 2013, le groupe n’en finit plus de grandir. D’une poignée de garages à Charleroi/Sambreville, le groupe de concessions BMW, Mini, Jaguar, Land Rover, Mazda, Lotus, etc. s’étend désormais sur toute la Wallonie et sur Bruxelles et ses environs. Et part même à la conquête du sud de la France.
L’aventure automobile de Laurent Louyet est celle d’une très grande ambition. « Comme dans tous les domaines, ce qu’il faut en premier, c’est la motivation. C’est le point commun de tous les entrepreneurs qui réussissent: cette faculté de se fixer un objectif ambitieux et de se donner les moyens pour y arriver« , dit-il.
Mais le manager de l’année 2024 a une relation atypique avec sa société. « Je vois l’entreprise comme une personne et j’en prends soin comme un membre de ma famille. Chaque décision que je prends, je la prends en me demandant si elle est bonne pour mon entreprise, comme on le ferait pour son enfant », assure Laurent Louyet.
Issu de la troisième génération, c’est de l’héritage familial de son père et de son grand-père qu’il prend soin.
Si les acquisitions s’enchainent, « il ne faut pas croire que l’on a pris toutes les opportunités qui se sont présentées devant nous. Nous étudions constamment des dossiers, mais quand une belle opportunité passe, il ne faut surtout pas rater le train« , témoigne-t-il.
Et il n’a dû forcer la main de personne, raconte-t-il. Dans le secteur de la distribution automobile, il semble que beaucoup d’investisseurs soient vendeurs.
Il y a quelques années, une série de concessionnaires ne croyaient plus dans l’avenir de leur business, pas Laurent Louyet. « Je crois dans l’automobile, la mobilité individuelle et la liberté qu’elles nous procurent », explique-t-il.
« À chaque reprise, l’histoire est différente. Au début, il s’agissait de gens qui croyaient moins dans l’automobile et ne voulaient pas grandir. Aujourd’hui, c’est plutôt l’absence de succession qui crée des opportunités. Des propriétaires n’ont pas d’enfants ou leurs enfants ne sont pas repreneurs de l’entreprise », raconte-t-il. S’il avait fallu insister, « nous n’aurions pas été aussi vite », pointe-t-il.
Il faut avoir le feu sacré dans son domaine. Laurent Louyet respire au rythme de sa société dès le réveil, et ce, jusqu’en fin de soirée. C’est là aussi que se fait la différence.
Il faut dire que si le Belge a une brique dans le ventre, il a aussi une BMW dans son garage. BMW est à nouveau la première marque automobile de Belgique, avec plus de 26.000 immatriculations sur six mois. Même plus de 30.000, si on rajoute les immatriculations de Mini, l’autre marque du groupe BMW, qui progresse de près de 89% sur un an au premier semestre. Louyet possède 16 concessions BMW et dix Mini.
Cette réalité d’un marché automobile très premium est intimement liée à la voiture de société, et colle parfaitement avec le positionnement luxe/premium d’un groupe comme Louyet. Chaque article sur le coût fiscal du système est donc lu avec beaucoup d’attention par Laurent Louyet et ses pairs.
« La fiscalité automobile reste la plus grande menace sur notre business », concède l’homme. Un changement radical dans le futur et ce serait toute une mécanique sectorielle et la kyrielle d’emplois qui vont avec qui pourrait s’enrayer.
Mais là encore, Louyet a réussi à prouver une autre de ses forces depuis une bonne dizaine d’années: sa grande flexibilité. Rien n’est figé, la structure est totalement redessinée si nécessaire au gré des acquisitions et des évolutions. Une flexibilité essentielle de nos jours, alors que tout va à du 200 à l’heure.
Alors que Laurent Louyet connait une belle ascension, il est aussi plus sollicité qu’avant. « Je suis certainement plus souvent invité qu’avant », sourit-il. « Je ne veux jamais donner de leçons à personne. Nous avons notre histoire et notre vision de l’entrepreneuriat, mais cela ne veut pas dire que d’autres façons de faire ne sont pas tout aussi valables. »
« Mon focus reste sur l’humain. C’est essentiel pour le recrutement et pour conserver les gens ensuite dans l’entreprise », développe-t-il. Grandir a, certes, amené de l’échelle, mais cela a surtout permis à Laurent Louyet « de bien s’entourer ».
Rien ne ronronne dans l’automobile. Laurent Louyet envisage encore des petites reprises. Il regarde aussi avec attention ce qui se passe en Chine. « Pour nous, ce n’est pas le moment de travailler avec des marques chinoises, mais on ne les snobe surtout pas, et on reste très attentifs. Tout va tellement vite que ce qui est vrai aujourd’hui ne le sera peut-être plus demain », dit Louyet. Il donne en exemple Tesla qui est montée à une vitesse folle dans les flottes d’entreprises et qui en sort actuellement très vite également.
Mais surtout, l’ambition de Louyet l’a amené à faire ce que personne ne faisait en Belgique dans le milieu de la concession automobile, à savoir passer la frontière (à l’exception du Luxembourg où les Belges sont plus présents).
C’est d’autant plus paradoxal alors que les groupes suisses, français, néerlandais ou suédois ont déferlé sur notre territoire pour racheter des garages. Laurent Louyet se dit que si tous ces groupes peuvent le faire chez nous, pourquoi ne ferions-nous pas de même dans les autres pays. « Il y a de très grands groupes belges, en Flandre notamment. Franchement, je ne m’explique pas pourquoi des Belges ne l’ont pas fait jusqu’ici », dit-il.
Plus précisément, Laurent Louyet entend répéter ce qu’il a fait en Belgique, mais en France: « recréer un deuxième Louyet », en quelque sorte.